Flims et les lacs sauvages des Grisons

28 août 2019

Tu connais mon credo: «Pas besoin de partir au bout du monde pour être émerveillé». De ma fenêtre sur la Broye vaudoise, les Grisons ont justement un goût de bout du monde. Et pourtant… J’ai sauté dans le train un soir après le travail et je suis arrivée à Coire en moins de 2h30, pour une parenthèse en pleine nature plus que convaincante.

Honnêtement: qu’est-ce que ça t’évoque, les Grisons? Avant d’y aller, j’aurais résumé ma faible connaissance du plus vaste canton de Suisse à ces quelques clichés plus ou moins fondés: c’est loin; on parle romanche; le chef-lieu est Coire (merci l’école) et en allemand c’est Chur (merci le Monopoly); c’est là-bas que se trouve Davos, où on fait des luges et des sommets internationaux; c’est un canton de campagne et de montagnes, on y visite le parc national suisse.

Ce n’est pas en passant un week-end dans un canton qu’on apprend à le connaître, mais c’est l’occasion d’en avoir un premier aperçu. Si l’histoire de ce canton t’intéresse, je te recommande cet article d’Helvetia Historica (et la visite de tout son blog, passionnant et vraiment bien écrit). Je vais, quant à moi, me limiter au côté découvertes et paysages. Pour cela, j’ai décidé de rester dans la région de Coire en séjournant à Flims, bon point de départ pour voir les fameux Cauma- et Crestasee, découvrir les fascinantes gorges du Rhin et profiter de l’air pur de la montagne.

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«Der Weg ist das Ziel», lit-on sur les cars postaux qui sillonnent la région. À la gare de Coire, au pied des montagnes, je monte dans le 81 pour rejoindre le petit village de Flims, où je poserai mon sac pour les quatre prochains jours. Avant de démarrer, le chauffeur demande si tout le monde va bien et nous souhaite un bon voyage, le tout en allemand – premier cliché démenti: seuls 15% des habitants des Grisons parlent le romanche.

Le trajet dure un peu plus d’une demi-heure et le décor est magnifique. Le bus traverse des petits villages pittoresques avant d’atteindre Flims où les chalets aux fenêtres fleuries côtoient des maisons de pierre froide. Et le mélange fonctionne assez bien. En hiver, les skieurs rejoignent d’ici les larges pistes du domaine de Flims-Laax-Falera. En été, les ruelles s’emplissent de touristes randonneurs, avec leurs bâtons, leurs grosses chaussures et leurs t-shirts multicolores – simple constat sans jugement, j’accepte ma condition de randonneuse du dimanche en baskets.

Mon hôtel, sans charme mais confortable et peu cher, se situe au creux de ce décor de montagnes et de verdure, à 10 minutes de l’arrêt de bus et du centre du village. Idéal pour le programme de ces prochains jours. Il commence d’ailleurs avec la découverte de deux lacs emblématiques, très proches au premier abord, mais finalement bien différents…

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C’est une perle turquoise auréolée d’arbres vert foncé que les locaux désignent volontiers comme le plus beau lac de Suisse, voire du monde. On ne peut pas vraiment les contredire: le Crestasee est magnifique.

Sa visite est un incontournable. On atteint ce petit paradis en une quinzaine de minutes de marche depuis l’arrêt de bus Felsbach-Crestasee. L’occasion de traverser la forêt et de s’arrêter quelques instants devant la cascade, puis sur le pont qui surplombe la rivière. Mais pas longtemps – l’appel du lac est plus fort.

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Dans les lieux touristiques, l’appât du gain grignote trop souvent l’authenticité, et les jolis lacs grisons n’y échappent pas vraiment. Ici, un écriteau indique que les visiteurs sont priés de passer au kiosk sur la plage pour se délester de quelques francs (7.– pour les adultes, avec un généreux franc de rabais pour les détenteurs de la «Gästekarte» livrée par les hôtels de la région). Voulant éviter la foule, je m’y rends en toute fin de journée, alors que les derniers baigneurs désertent les lieux. Bonne idée puisque le tenancier du kiosk, fatigué, juge qu’il est trop tard pour me faire payer.

Devant le kiosk, la plage est aménagée pour accueillir les visiteurs. Mais on profite au mieux de cet écrin de nature en s’aventurant sur les berges sauvages du lac. Il suffit de s’engouffrer dans la forêt, et de suivre l’un des nombreux sentiers étroits et boueux. En une petite demi-heure, on sera de retour au point de départ, les yeux remplis de la magie de ce spectacle. L’eau turquoise, les sapins partout autour et la solitude d’une journée de fin d’été…

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Plus grand, un peu plus au Sud, le Caumasee est aussi un incontournable de la région. Depuis Flims, je m’y rends à pied, par de jolis chemins forestiers. La promenade est agréable et je la partage avec une gentille dame âgée qui promène ses deux chiens et me raconte son amour pour cet endroit. Elle vient régulièrement y passer quelques semaines en pleine nature, loin de l’agitation de Winterthour, où elle vit.

C’est vrai que le cadre est apaisant. Mais malgré des ingrédients similaires au Crestasee – les montagnes en fond, le reflet des sapins sur l’eau turquoise, le contour imprécis des pierres qui tapissent le fond du lac –, la magie n’opère pas vraiment. La faute à la gourmandise du tourisme (que je nourris, j’en suis consciente), qui érige des grillages autour des endroits trop beaux pour être admirés gratuitement, bétonne les rives du lac, le couvre de pédalos en plastique aux couleurs criardes et édicte des interdictions qui régissent un endroit pourtant qualifié de « zone de détente ». Pas de feu, pas de musique, pas de grillades, pas d’animaux, pas de camping, blablabla.

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Mais oublions ce côté négatif pour s’émerveiller quand même du spectacle. Il suffit pour cela de se limiter à la rive sud/sud-ouest du lac, accessible librement. Tôt le matin, il n’y a encore personne, ou presque; un nageur solitaire froisse silencieusement la surface du lac. Je profite d’un grand caillou plat et accueillant pour déposer mes affaires et en faire de même. L’eau est fraîche et agréable. Autour de moi, les poissons font des petites bulles paresseuses qui viennent éclore à la surface. Je ferme les yeux et le temps semble s’arrêter…

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Les éclats de voix, encore discrets, se faufilent depuis l’autre côté du lac. Un bruissement parcourt la forêt endormie et je perçois l’agitation qui s’éveille et gagne petit à petit les lieux. On entend le bruit des chaises longues que l’on déplace, le rire ingénu de quelques enfants. Et la vie reprend son cours, immuable refrain d’un dernier samedi d’été.

 


Infos utiles

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  • Logement: Hôtel T3 Surpunt

    Rien d’exceptionnel à en dire. J’ai payé 177.– pour trois nuits en chambre simple, finalement upgradée en double, et en réservant à la der’ (moins d’une semaine avant).
  • Plus d’infos sur le Crestasee

    Et j’apprends à la rédaction de cet article qu’il est interdit de faire voler un drone dans les environs – oups! Astuce de fraudeur: en arrivant depuis le pont, juste après les panneaux jaunes en photo ci-dessus, tu peux te faufiler dans la forêt en suivant le chemin sur la gauche et ainsi éviter de passer par le kiosk.
  • Plus d’infos sur le Caumasee

    Astuce pour des photos: là, le drone est explicitement interdit. Pour avoir une jolie vue aérienne, il suffit de prendre le funiculaire gratuit qui se trouve près de l’entrée et des caisses. Je n’ai pas testé, mais c’est un conseil de la gentille dame aux chiens.

Cet article n’aurait pas été possible sans

  • le soutien financier de mon compte bancaire (faut pas croire, hein)
  • le soutien matériel dronistique d’Anthony – MERCI

  • l’inspiration/fièvre des Grisons de Fabrizio – MERCI

 

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Catégories : Été | Suisse

11 Commentaires

  1. Marie

    Merci Camille pour ce bel article qui nous fait découvrir de belles régions dans notre charmant pays

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    • Camille

      Merci Marie pour ton commentaire et ton passage! 🙂

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  2. Ben J.

    Salut! Sympathique article sur ces lacs qui ont l’air très beaux. Cela donne envie de visiter la région 🙂

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  3. Sandrine

    Bonjour, très chouette article. J’ai été plusieurs fois dans la région, c’est vrai que ce sont de beaux paysages. Je préfère le Crestasee, c’est vrai qu’il y a un côté moins touristique que le Caumasee. Mais les deux sont très beaux.

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    • Camille

      Merci! On est d’accord, les deux lacs sont magnifiques mais le Crestasee est plus sauvage 🙂

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  4. Marion

    Joli article! 🤩 🤩

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  5. javet

    Belles photos et article intéressant! 🙂 🙂

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  6. Peter

    Ho mais comme c’est beau! Merci pour ton avis sur ces deux lacs, je m’y rend justement cet été et je cherchais des infos. Je me réjouis de découvrir ça en vrai!

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    • Camille

      Avec plaisir, merci pour ton commentaire. Et bon voyage dans les Grisons, du coup 🙂

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Bienvenue à bord

Je m’appelle Camille et je suis touriste professionnelle (entre autres). J’ai créé Lève l’encre en 2017 pour partager le récit de mes voyages à la découverte des paysages de Suisse et d’ailleurs. J’espère te donner envie de voyager, notamment en privilégiant le train – pour la planète, mais aussi parce que c’est une expérience exceptionnelle.

[photo: © Simon Brunet]

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